Le football aux footballeurs
Parmi les slogans de mai 1968 inscrits dans la mémoire collective, on se souvient de «il est interdit d’interdire» ou «Sous les pavés la plage», d’autres sont moins connus et parfois plus surprenants. C’est le cas du tract intitulé «Le football aux footballeurs» diffusé en pleine crise étudiante, alors qu’un collectif de footballeur auquel participent des professionnels du Red Star occupe le siège de la Fédération au 60 avenue d’Iéna. Reprenant la même phraséologie révolutionnaire du printemps 68, ses auteurs prétendaient revenir au football des origines dégagé de sa «gangue» capitaliste.
Derrière les attaques personnelles portées contres les «caciques» de la fédération et du groupement des clubs professionnels ou encore les remises en cause du fonctionnement jugé peu démocratique de la FFF, se dévoilaient en fait des revendications tout à la fois corporatives et idéologiques. En effet, se réclamant du combat mené depuis le début des années 60 par Raymond Kopa pour mettre fin au «contrat à vie» qui attachait un joueur à un club depuis ses débuts dans le professionnalisme, ses rédacteurs prétendaient également faire la part belle à l’amateurisme et rendre le pouvoir au footballeur de base.
Ce type de revendication jugée alors utopique ou fantaisiste comme une bonne partie des engagements de mai 68 rencontra peu d’écho sur le moment mais a connu une issue favorable avec l’instauration du contrat à temps à partir de 1969.
Laurent Bocquillon
Université de Nice