La naissance de l'Euro
Le championnat d’Europe de football s’est progressivement imposé comme un rendez-vous majeur pour les passionnés de ballon rond. Troisième événement sportif de la planète après la coupe du monde de football et les jeux olympiques d’été, il suscite désormais une concurrence entre les nations du « Vieux continent » : soit qu’elles souhaitent l’accueillir, soit qu’elles espèrent voir leur sélection nationale respective l’emporter ou, au moins, y faire bonne figure. Cependant, la compétition a connu des débuts difficiles, tant pour des raisons sportives que politiques.
Secrétaire général de la FFF, Henri Delaunay avait déjà évoqué la création d’un championnat d’Europe des nations au cours de l’entre-deux-guerres. Après sa mort en 1955, son fils, Pierre, reprend l’idée et la soumet au comité exécutif de l’UEFA, organisation dont il est par ailleurs le secrétaire général. Réunis à Stockholm en 1958, les élus du football européen acceptent le principe. Cependant, il pose une condition : la nouvelle épreuve ne pourra se dérouler que si au moins 16 pays y participent. Or, les grandes nations du football européen, parmi lesquelles l’Allemagne, l’Angleterre et l’Italie, doutent de son succès. Leurs dirigeants refusent d’inscrire leur sélection nationale. Pierre Delaunay parvient tout de même à convaincre 17 fédérations qui lui permettent d’organiser en 1960 la première édition de ce qu’on appelle encore la « coupe d’Europe des nations ». Mais l’absence des meilleures sélections européennes affaiblit l’intérêt de la compétition et menace, de ce fait, son avenir.
Les premières épreuves sont également entachées d’incidents diplomatiques. Le premier, en 1960, s’inscrit dans le cadre classique des tensions Est-Ouest. En quarts de finale, le tirage au sort désigne l’Espagne comme adversaire de l’URSS. Le Général Franco interdit à la sélection nationale espagnole de se rendre à Moscou et l’URSS se qualifie sur tapis vert, obtenant ainsi le droit de jouer la phase finale en France. Les Soviétiques remporteront le tournoi.
Quatre ans plus tard, l’épreuve est également confrontée à des problèmes politiques. Les fédérations nationales de Grèce et d’Albanie, dont les équipes nationales doivent s’affronter dans les tours préliminaires, refusent de se rencontrer. En effet, les deux pays sont alors officiellement en guerre. Les origines de ce conflit remontent au début du siècle, plus précisément au moment des Guerres balkaniques (1912-1913) qui avaient eu pour conséquence l’indépendance de l’Albanie et l’octroi par les puissances occidentales au nouvel ?tat de l’?pire du Nord, territoire revendiqué par la Grèce. Ainsi, pour la deuxième fois d’affilée, la coupe d’Europe des nations était confrontée à un problème d’ordre politique qui pouvait laisser présager des difficultés futures.
Cependant, l’adhésion progressive des grandes nations européennes après 1964 ainsi que l’absence d’incidents diplomatiques renforcèrent l’intérêt de la compétition, appelée officiellement championnat d’Europe des nations depuis 1968, et lui permis de s’affirmer comme la première épreuve sportive européenne.
Xavier Breuil