George Best
George Best appartient au cercle restreint des individualités les plus emblématiques du sport britannique. Ses exploits sportifs, notamment avec le club de Manchester United, sont sans aucun doute les plus connus du public.
En septembre 1963, fraîchement professionnel alors qu’il n’a que 17 ans, le frêle ailier gauche originaire de Belfast (Irlande du Nord) effectue ses débuts en première division contre la rude équipe de West Bromwich Albion. Sa carrière connaît ensuite trois temps forts. Lors de la saison 1964-65, il est l’un des artisans du titre de Champion d’Angleterre obtenu par Manchester United, dans un duel au dénouement indécis avec Leeds. Au cours de la saison suivante, le 9 mars 1966, il est l’un des grands artisans de l’écrasante victoire de son club (5-1), en quart de finale de Coupe d’Europe, à Lisbonne, face au Benfica. En 1968, il permet à Manchester United d’être la première équipe anglaise à remporter la Coupe d’Europe des Clubs Champions. Ces performances récompensées par des titres de meilleur joueur anglais et un Ballon d’or européen lui confèrent une reconnaissance sportive internationale.
Mais, au-delà de la simple performance sportive, il reste l’incarnation de l’esprit d’une époque : les années soixante. La décennie marque le recul des valeurs datant de l’ère victorienne. C’est l’avènement de nouvelles règles contractuelles (abolition du salaire maximum imposé depuis 1901, fin du système de prolongation de contrat et de transfert en place depuis 1893) et l’adoption de normes de comportement inédites (influence américaine, jeunesse en rébellion, dépénalisation de l’homosexualité, légalisation partielle de l’avortement). C’est aussi une période pendant laquelle les médias s’emparent des sportifs et oeuvrent à leur starification. La presse, pas seulement sportive, a fait de George Best une véritable star, au même titre que les acteurs de cinéma et les Beatles. Son style et son train de vie débridés et flamboyants suscitent la curiosité. Peu de sportifs avaient auparavant attiré autant l’attention. Les réclames publicitaires et les passages à des émissions de télévision de grande audience (Michael Parkinson’s Show) le rendent encore plus populaire. Ses frasques (absentéisme à l’entraînement, retards au lieu de rassemblement d’avant match, ébriété à quelques heures d’une rencontre importante) font de lui le symbole à la fois des jeunes footballeurs en rupture avec les conditions de vie spartiates des anciens joueurs mais aussi , plus largement, d’une génération issue de la working class succombant au mirage de la célébrité et du star-system.
Seul son entraîneur, Matt Busby, paraît en mesure de canaliser son tempérament. La relation entre les deux hommes constitue un exemple de rapport quasi paternel entre un joueur et son entraîneur. Busby est toujours consulté par Best lorsque le joueur a à prendre de grandes décisions du joueur tant sur le plan personnel que professionnel. Ainsi, Matt Busby persuade George Best de rechausser les crampons après que l’Irlandais du Nord a décidé, à l’âge de 26 ans, de mettre un terme à sa carrière. Il ne joue toutefois que deux saisons encore dans le championnat anglais avant de rejoindre outre-Atlantique d’autres stars du ballon rond pour un exil doré. Contrairement à Pelé, Beckenbauer ou encore Cruyff, Best n’a été qu’une étoile filante sur la scène internationale. Pourtant les supporters anglais n’hésitent pas à en faire un des meilleurs joueurs du monde, révélant ainsi, une fois encore, la vision très insulaire du football entretenue outre-Manche.
Claude Boli
Université d’Evry